C’est le 3 juillet dernier que Japan Expo recevait Shigeru Miyamoto, le génie créateur de Super Mario et Zelda, dans une master class en présence de 12 000 personnes. Il s’est passé un truc, et Mageek vous dit quoi.

Shigeru Miyamoto, créateur de Mario, et Grégoire Hellot, traducteur et directeur de collection chez Kurokawa. – J. Metreau / 20 Minutes
Le moment était historique, comme l’ont abondamment rappelé les organisateurs de Japan Expo, épaulés par Bertrand Amar en maître de cérémonie et Grégoire Hellot à la traduction, qui recevaient en grande pompe Miyamoto Shigeru dans le plus grand hall du parc des expositions de Villepinte. Il faut dire que c’était la première fois ever que Shigeru-san s’exprimait devant un public de fans. On peut donc comprendre l’émotion nerveuse qui a pris les deux créateurs de Japan Expo arrivant sur scène pour annoncer leur invité. Un voyage pour vendre des jeux et des consoles certes, mais aussi la consommation d’un amour avoué entre Nintendo et Japan Expo, le salon ayant dégainé un stand totalement hors norme pour dûment mettre en avant les hits futurs ou actuels de la firme de Kyoto, dont Starfox Zero, Super Mario Maker et Splatoon. Tant pis pour ceux qui attendaient de cette master class qu’elle esquisse un portrait général du génie inventeur de Mario et de la Wii Fit. Miyamoto était clairement venu vendre ces titres, dans un style tout à fait Nintendo.
Après quelques politesses, la conférence débute donc avec Starfox Zero, qui avait déjà reçu quelques écueils lors des premières phases de tests de l’E3. En effet, un test du premier niveau qui vous ramène dans la fameuse cité de Corneria effectué la veille nous a laissés perplexes quant à la bonne assimilation des contrôles. L’incursion du gyroscope dans le gameplay pour diriger les tirs du vaisseau est très troublante, et obligera votre cerveau à réveiller certaines zones probablement bien endormies. Pour rassurer son monde, Shigeru-san a pris le soin de commenter en live la partie d’un jeune homme venu exécuter le niveau de Corneria presque sans aucune faute, histoire de prouver que l’épreuve n’est certainement pas insurmontable. C’est donc un peu plus à se mettre sous la dent que ce qui avait été présenté à l’E3, bien que malheureusement, le rendu graphique du jeu est tout aussi décevant. Décors pauvres, absence de détails, design peu inspiré, les capacités graphiques de la Wii U ne sont clairement pas exploitées pour le plaisir de nos yeux.
Pour vous faire une idée, prenez le temps de comparer ces deux vidéos. La première est le trailer E3 du prochain Starfox Zero et la deuxième une capture du Starfox Assault sorti sur Gamecube en 2005 sur un émulateur Dolphin en 1080p/60fps.
Toutefois, Shigeru-san était venu avec quelques vidéos exclusives de gameplay des tout nouveaux véhicules, le Walker et l’hélicoptère, qui permettront de nouvelles phases de gameplay axées sur l’infiltration, dont on a enfin mieux compris les tenants et les aboutissants, notamment grâce à la très bonne traduction technique de Grégoire Hellot qui nous a fait ça comme un Silver Mousquetaire. Un peu de longueurs, quelques répétitions, il était temps de passer à autre chose, même si on comprend qu’une licence aussi chère à Miyamoto que Starfox exigeait la cérémonie qu’elle mérite.

Une idée exhumée de l’avorté Starfox 2 : la transformation de l’Arwing en Walker, qui fera son apparition dans Starfox Zero
Alors quand vient le moment d’évoquer Super Mario Maker, l’audience légèrement distraite se reconcentre quand Miyamoto fait venir sur scène son Luigi à lui, Takashi Tezuka, producteur sur la plupart des Mario et autres gros titres de Nintendo. Les anecdotes que les deux briscards balancent en se chambrant comme un vieux couple amènent enfin un peu d’authenticité à cette master class pour l’instant très protocolaire, et préparent les esprits à assimiler le fait que Super Mario Maker est une méga grosse claque, ce que personne n’avait vu venir.
Imaginez. Un programme assisté vous permettant de vous initier aux bases du level design, qui vous donne la possibilité de tordre du Mario dans tous les sens avec la promesse de vous transformer en Michel Gondry du jeu vidéo ? Shigeru-san compare modestement ce nouveau soft à Mario Paint sur Super Nes, mais les différentes démonstrations montrent que c’est bien plus que cela. Tezuka fait rire l’audience en plaçant des Bowsers partout sur un même niveau, Miyamoto soulève les applaudissements en terminant un niveau parodiant Pacman designé par Michel Ancel (le papa de Rayman) et les deux finissent de conquérir le public en dévoilant en exclusivité un niveau parisien spécialement conçu pour Japan Expo. Enfin, Tezuka sort de sa poche un petit livre, sorte de mode d’emploi, rempli de tutoriels et de fondamentaux de game design. Un bréviaire qui sera livré avec chaque copie de Super Mario Maker. Petite feature qui tue pour finir, tous les Amiibo sortis à ce jour débloqueront dans le jeu des nouveaux personnages aux caractéristiques propres. Des « Wah » à peine contenus fusent dans la salle.
Pour terminer, les deux papys débarquent Sakaguchi Tsubasa, réalisateur de Splatoon, venu rouler des mécaniques et donner le coup d’envoi du tournoi local de Japan Expo, promettant de se mesurer en personne face au gagnant. Le show est total, Bertrand Amar remercie les invités, et la foule se rue sur le devant de la scène pour espérer prendre une photo correcte du mécène Miyamoto. La mission de Japan Expo est réussie. En recevant Miyamoto, elle s’installe comme festival de pop culture majeur sur la scène mondiale, et, ivre de sa romance avec Big N, peut se permettre de rêver à recevoir M. Miyamoto de nouveau à l’avenir.
Peut-être un peu trop commerciale, la master class de Shigeru Miyamoto a pourtant eu le mérite de montrer en direct ce que Nintendo fait le mieux (innover). Prendre une idée simple pour la transcender et en faire quelque chose de riche, attachant et amusant, c’est la seule alchimie que Big N s’obstine à recréer encore et encore. En décortiquant Super Mario Maker devant nos yeux, Miyamoto a exécuté la parfaite incantation pour le 30e anniversaire de son plombier moustachu et renouvelé des vœux d’amour avec son public. Alors finalement, est-ce si grave que Starfox ne ressemble pas à un triple A new gen, s’il parvient à stimuler ces parties endormies de votre cerveau où se trouvent de nouveaux territoires d’amusement ?
Constantin Berthelier
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